Paru dans Espaces contemporains
Mars 2013
Jérémie Gindre, un artiste né à Genève en 1978, est omniprésent. Le Centre d’art Fri-Art lui consacre une exposition monographique, et l’Institut Florimont, sur une invitation du Mamco, lui donne carte blanche pour un singulier parcours muséal.
La variété des passions, est le titre d’une nouvelle écrite par Jérémie Gindre pour un projet de résidence d’écriture au Canada. L’histoire se déroule sur la route de Drumheller, dans la vallée de la Biche au Canada, où la « Capitale Mondiale des Dinosaures ». Paul douze ans, se lie d’amitié avec Clifford, un jeune vacancier hyper-équipé, dans le camping où ils séjournent tous les deux, avec leurs parents. Les deux garçons explorent ensemble l’environnement canadien, en alternance avec les visites de sites touristiques et de musée d’attractions qu’affectionnent leurs parents. Ainsi, ils assistent à une représentation théâtrale de la Passion du Christ dans un site naturel ou découvrent un musée historique régional faisant se côtoyer des objets hétéroclites rassemblés par une communauté d’habitants. A partir de ce récit rempli d’objets comme un cabinet de curiosité, Jérémie Gindre compose un rébus spatial qui se situe entre l'aube de la découverte, et le plein midi du tourisme.
Dans les douze vitrines du Musée d’histoire naturelle miniature oubliées dans un couloir du bâtiment des sciences de l’Institut de Florimont, il compose un ensemble de maquettes qui reproduisent les salles d’exposition du Mamco à l’identique, jusque dans les mises en couleur des murs, et les traces permanentes au sol. Les objets assemblés proviennent de trois sources s ensembles rassemblés par les enseignants et qui occupent les vitrines tels que des coquillages, oiseaux naturalisés, minéraux précieux, objets historiques, ou collections d’insectes.
Après avoir opéré une sélection, il mêle à cette collection des œuvres qu’il a réalisée, ou d’autres empruntées au Mamco comme celles de Jim Shaw, Sol Lewit ou Allan Mc Collum. Ces assemblages constituent des maquettes de salles d’exposition similaires à celle du Mamco, jusqu’aux traces permanentes du sol, à la mise en couleur des murs. Elles portent chacune des noms un peu naïfs comme Salle Détente, Salle Camping, Salle Prairie, Salle Malchanche, ou Salle Ciel. Cette dernière, particulièrement ravissante, comporte un fond rose, un nuage en marbre de Anne-Marie Jugnet et Alain Claret, et une buse variable empaillée. Hormis ses qualités esthétiques, l’exposition Variété des passions est captivante parce qu’elle créé une mise en abîme de l’idée du musée et de sa forme. En recréant extra muros les salles du Mamco en miniature, elle le téléporte ailleurs, à la rencontre du public, au cœur de l’environnement qui est le sien, et à partir des objets de son imaginaire. Les espaces mentaux du rêve et du souvenir.
